Comment imaginer qu’il y a 5 000 ans, des Chinois inspirés ont pu penser une médecine aussi puissante ? C’est en observant la nature que la médecine traditionnelle chinoise a élaboré une stratégie géniale basée sur l’énergie vitale : ce qu’ils appellent le « Qi ». Des millénaires plus tard, on est toujours bluffé par l’efficacité de pratiques comme l’acupuncture, la pharmacopée Chinoise, ou le Qi Gong, aujourd’hui démontrée par des études scientifiques et validée par l’OMS. Aussi pourquoi ne pas profiter de ce savoir-faire ancestral – certes différent du nôtre, mais plein de bon sens – pour combattre les agressions que subit l’organisme aux changements de saisons par exemple ?
Stimuler votre empereur !
Pour les Chinois, chaque saison sollicite plus particulièrement deux de nos organes clés : l’un appelé « empereur », 1’autre « émonctoire », car il permet de faire circuler ce que l’empereur a produit ou cherché à éliminer. En les stimulant grâce à l’alimentation, on s’assure de leur bon fonctionnement et de la bonne circulation de l’énergie. Car le corps, pour être en bonne santé, doit toujours être en harmonie avec ce qui l’entoure. À défaut, l’énergie ne circule plus correctement, et c’est la porte ouverte à l’apparition de divers problèmes : fatigue, mal-être, dérèglements du transit, et nombre de troubles quotidiens… Pour les éviter, une seule solution : bien choisir ses aliments et les adapter aux saisons.
La vraie « nature » des aliments
Pour analyser les propriétés thérapeutiques des aliments, la très ancienne diététique chinoise observe leur « nature », leur « saveur » et leur lieu d’action, mais aussi leur consistance, leur couleur, et leur forme. Les natures froide, fraîche, neutre, tiède ou chaude des aliments conditionnent leur effet réchauffant ou refroidissant sur l’Énergie de l’homme. Un aliment est de nature chaude ou froide selon qu’il « réchauffe » ou qu’il « refroidit » l’Énergie. Les saveurs manifestent l’activité vitale des aliments. C’est pourquoi la diététique chinoise analyse les actions énergétiques bien spécifiques que les saveurs induisent : l’acide est astringent, l’amer assèche l’humidité et favorise l’écoulement, le doux tonifie, le piquant disperse, le salé ramollit.
Les 4 phases de la vie et l’importance des saisons
La médecine chinoise sait que la vie n’existe pas sans des phases, des alternances de souffles : le souffle tiède du printemps devient la chaleur de l’été ; et le souffle de l’été, ayant atteint l’apogée du yang, devient la montée du yin automnal, marqué par le refroidissement, etc. Il y a quatre temps qui rythment chaque vie, du début à la fin : les êtres apparaissent, croissent, déclinent et disparaissent, puis tout se renouvelle. De la même manière, quatre temps rythment les périodes de la vie, selon ce même modèle : de l’aube à midi et du soir à la nuit, par exemple, pour chaque journée. Dans le développement d’une entreprise, d’une situation, ou d’une relation amoureuse par exemple, ces quatre phases successives doivent être respectées pour assurer la bonne continuité et la bonne santé. Il en est de même pour les quatre grandes saisons, très importantes pour la médecine chinoise. 1. Le printemps : élevez votre énergie vitale avec du « tiède » Au printemps, qui correspond aux mois de février, mars, et avril, on assiste à une élévation de l’énergie vitale, le « Qi ». L’énergie s’élève après la période de léthargie de l’hiver. Durant cette période de réveil et de renouveau dans la nature, chaque être participe à la grande renaissance. Chez l’homme, le Foie est le lieu énergétique par où se réalise l’élévation de l’énergie Yang dans l’organisme. Au printemps, il convient donc d’accompagner cette élévation du Yang afin qu’elle s’opère de façon correcte. En premier lieu, la diététique chinoise conseille de diminuer pendant cette période la part des produits de saveur acide afin de permettre le mouvement d’élévation de l’énergie. Afin de favoriser la renaissance du Yang on pensera à consommer des aliments à dominante tiède, légèrement épicée (piquante) et amère mais sans excès, et à consommer très modérément les aliments froids et crus. Les graines germées cuites à l’eau, à la vapeur ou sautées sont particulièrement indiquées en cette saison.
Parmi les légumes : les carottes, asperges, céleri, champignons noirs, betterave, pois, courgettes, pommes de terre, potiron, radis, chou, chou-rave, brocolis.
Parmi les graines et féculents : les haricots rouges, azukis, patates douces, taros, les céréales telles que maïs, riz glutineux, blé, orge, avoine.
Parmi les épices et aromates très parfumés : gingembre, ail, ciboulette, cumin, échalote, persil, safran…
Parmi les produits animaux : les poissons maigres, viandes rouges peu grasses et blanches (bœuf, dinde, poulet, pigeon).
Des fruits tels que les pommes, dattes, jujubes, figues séchées, et papaye.
2. L’été : mangez des aliments de « nature froide » Pendant l’été, c’est-à-dire durant les mois de mai, juin et juillet, l’activité vitale est à son maximum. À cette saison, l’énergie se réchauffe. Des quantités importantes de liquides organiques sont perdues à cause de la transpiration – elle-même indispensable à l’évacuation naturelle de la Chaleur d’origine externe qui envahit la superficie du corps – et également par un processus de consomption interne plus important à cette époque de l’année : plus il fait chaud (Yang), et plus les liquides (Yin) diminuent. Il convient par conséquent de contrebalancer la perte des liquides organiques occasionnée en consommant davantage les aliments de nature fraîche ou froide et de saveur douce, salée ou acide. On privilégie les aliments de nature froide pour rafraîchir le corps et le cœur, et de saveur amère pour les aider à bien fonctionner.
Parmi les légumes et les fruits : la pastèque, le melon, les pommes, les épinards, les artichauts, endives, roquette, laitue, les aubergines, le céleri, les algues, la rhubarbe, les carottes, le maïs ou le concombre, kiwis, abricots, pêches, figues, dattes.
Parmi les produits animaux : agneau, mouton, fromages de brebis et de chèvre.
Parmi les épices et aromates : thym, sauge, basilic, curcuma, cacao, thé vert, café…
Attention par ailleurs à ne pas boire glacé pendant les repas, cela reviendrait à jeter un seau de glaçons sur un feu de cheminée (feu de l’estomac). 3. À l’automne, tonifier votre « Qi » avec des aliments doux Pendant l’automne, correspondant aux mois d’août, septembre et octobre, l’Énergie Yang se retire pour laisser le Yin se développer. On assiste à un rafraîchissement des conditions climatiques. L’Énergie du corps retourne progressivement vers la profondeur et se refroidit. C’est le moment où il convient plus que jamais de protéger l’organisme contre les perturbations dues au rafraîchissement du climat. Les gastro-entérites sont fréquentes en cette période de l’année. La maladie peut facilement « entrer par la bouche ». La diététique chinoise recommande de réduire la quantité de fruits et autres végétaux crus, de boissons fraîches, et d’aliments de nature froide, afin de prévenir d’éventuelles perturbations des Intestins et de l’Estomac. Il convient par ailleurs de porter une attention accrue à la fraîcheur des aliments, notamment en ce qui concerne les poissons, viandes et coquillages. La consommation de produits de saveur piquante sera diminuée durant l’automne afin de ne pas contrarier le mouvement de retour de l‘Énergie vers la profondeur. L’alimentation devra comporter plus d’aliments acides et doux. Les produits de saveur acide « resserrent le Qi » et favorisent son retour vers la profondeur. Les aliments doux permettent de tonifier le Qi et d’équilibrer le mouvement de descente de l’Énergie propre à l’automne.
Des légumes tels que concombre, aubergine, soja vert, soja jaune, betterave, courge, navet, potiron, oignon, choux, cresson, algues, haricots blancs ou rouges, pois, lentilles, fèves, pommes de terre, patates douces, carottes, céleris, endives, choux-fleurs, châtaignes, champignons.
Des fruits comme les figues, coings, noix, prunes, melons, raisins, pêches, mangues, framboises, mandarines.
Des produits animaux : lapin, dinde, pintade, roquefort.
Parmi les épices et les aromates : radis, oignons, poireaux, gingembre, cardamome, moutarde, thym, ciboulette, origan, ail, thé à la menthe. 4. Quand l’hiver arrive, booster votre « Yin » avec votre alimentation En hiver, durant les mois de novembre, décembre et janvier, le Yin est à son maximum et le Yang à son minimum. Les nuits sont très longues. Dans la nature, toute vie est au repos. L’Énergie est retournée dans les racines des végétaux et s’est condensée dans les graines, en attendant le renouveau du printemps. Chez l’homme, cette période où l’Énergie du corps s’est refroidie correspond naturellement à un moment de repos. L’activité vitale Yang est à son minimum et les couches profondes de l’Énergie se rechargent. Pendant l’hiver, il est conseillé d’augmenter la part des produits animaux et de diminuer celle des légumes et des fruits. La viande nourrit plus spécifiquement la structure organique et contribue ainsi à recharger l’aspect physique de la vitalité. C’est le temps de l’immobilisme, un peu comme la sève qui redescend vers les racines pour un repos qui constitue une prémisse à une renaissance. À l’instar des animaux, il faudrait pouvoir hiberner, ce qui n’est guère prévu dans nos sociétés. Cependant, rien n’empêche de se coucher un peu plus tôt, de se lever un peu plus tard et d’éviter autant que possible de travailler dehors. L’hiver représente également le moment de nettoyer l’organisme en profondeur, afin d’éliminer tout ce qui n’est pas utile (notamment les minéraux en excès) et de privilégier la relaxation pour que le corps, comme l’esprit puisse se recharger en énergie vitale. Évitez les repas trop copieux, car les reins risquent de se fatiguer de tant d’excès, tandis que cet émonctoire, surchargé, pourrait affaiblir le système immunitaire, et rendre plus vulnérable aux virus (risque accru de grippes, de gastro-entérites, etc.). Privilégier les aliments de nature chaude, pour tonifier l’énergie du rein et procurer au corps la régulation thermique dont il a besoin. On y associera une saveur salée correspondant aux besoins énergétiques du rein. Le canard par exemple, doux et légèrement frais, est particulièrement indiqué pour tonifier le Yin dans tout le corps. Il élimine la fièvre légère créée par le Vide de Yin. Le poulet, doux et légèrement tiède, réchauffe le Foyer Moyen. Il revitalise le Qi et renforce le Jing (essences vitales contenues dans les Reins). Pour renforcer le Yang, le mouton et le bœuf sont indiqués. De saveur douce et de nature tiède, le mouton tonifie et réchauffe le Foyer Moyen (Rate-Estomac) et le foyer inférieur (Reins). Le bœuf renforce quant à lui la rate, source de l’énergie acquise. D’une façon générale, on diminuera les aliments de saveur rafraîchissante et l’on augmentera celle des produits plus riches et de saveur amère afin d’enrichir le Yin et de consolider le Yang. On mangera avec profit des produits consistants et nourrissants tels que semoule, pâtes, pet riz, sarrasin, froment, seigle.
Parmi les oléagineux, citons les amandes, cacahuètes, noix, noisette.
Parmi les légumes et féculents, la betterave, le chou-fleur, le chou, les épinards, les pois chiches, les flageolets, les pommes de terre, patates douces, topinambours, lentilles, haricots blancs ou rouges, azukis, soja noir, châtaignes.
Les poissons gras tels que thon, maquereau, cabillaud, sole, saumon, sardines sont également de circonstance.
En Chine, les repas sont généralement pris à 7 heures, 12 heures et 18 heures C’est un bon rythme, et sachez qu’en matière de nutrition, la régularité dans la prise des repas prime. Elle rythme la vie dans sa totalité et contribue ainsi à l’équilibre de chacun. Si l’on considère que les aliments séjournent quatre à cinq heures dans l’estomac avant d’être complètement transformés, ce rythme semble le mieux adapté. J’espère que ce voyage dans la diététique chinoise vous sera utile et vous permettra d’équilibrer vos énergies toute l’année. Je vous reparlerai de temps en temps de la médecine chinoise car même si elle paraît parfois lointaine et déroutante… elle est épatante ! Portez-vous bien
Luc Raux, praticien de Médecine Traditionnelle Chinoise.
www.medecinechinoise-44.com
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